Edito

Il y a un peu plus de quinze ans, au moment où nous nous apprêtions à nous lancer dans le projet du Nova, nous rencontrions Jean-Pierre Verscheure. Professeur à l’école de cinéma INSAS, Jean-Pierre est aussi un des historiens des techniques de cinéma les plus complets au monde, régulièrement invité à des colloques internationaux, et qui au début du Nova nous avait fait "cadeau" de quelques mémorables conférences. Connu et apprécié pour ses recherches dans les domaines du son et de l’optique, Jean-Pierre l’est aussi pour sa collection d’équipements cinématographiques, sonores et de projection (en état de fonctionnement !), unique en Europe, et probablement au monde. "L’histoire des techniques est très souvent occultée en faveur de l’histoire politique et économique alors qu’elle est fréquemment à la base des changements qui affectent celle-ci. Au moment où l’image numérique prend peu à peu la place de l’image argentique, il est utile et, selon nous, nécessaire, de rappeler le long cheminement qui a conduit à cette évolution." (J-P Verscheure/dossier Cinévolution). Et d’ajouter que revoir un film du passé dans les conditions d’origine peut non seulement nous aider à mieux comprendre la démarche et les enjeux artistiques de l’auteur, mais nous permet aussi d’aborder le cinéma contemporain dans une nouvelle perspective.

Depuis plus de vingt ans, Jean-Pierre cherche désespérément un soutien, des pouvoirs publics ou d’une fondation, pour la création d’un musée qui accueillerait cette collection, la rendant ainsi publique. Son rêve serait que ce musée soit "vivant" et non figé, ouvert à des projets didactiques, culturels, mais aussi d’étude et de recherche. Sans oublier que des partenariats avec des laboratoires et des sociétés de post-production pourraient être envisagés, car cette collection permet par exemple de masteriser tous les films réalisés depuis les débuts du cinéma selon les techniques de leur époque, ce qui est rarissime. Seulement voilà, jusqu’à présent, personne en Belgique n’a offert ce soutien. Et ce serait finalement en France que cette collection pourrait en partie être accueillie. Cyniquement on aurait envie de dire : tant mieux, au moins là il y a le terreau intellectuel et culturel que cette collection mérite. Mais en réalité nous sommes attristés et fâchés. Pourquoi ce manque de soutien des pouvoirs publics pour un projet aussi riche que cohérent ? Est-il trop tard pour que cette collection qui n’a pas de prix reste chez nous ? Est-il trop tard pour que cette collection ne soit pas éparpillée ? Faites un tour sur le web, vous n’y lirez que des éloges sur les conférences et autres séances de vulgarisation données par Jean-Pierre. Et venez profiter de celles qu’il donnera lors de notre semaine Kino Climates en juin. Vous serez certainement aussi interloqués que nous…